L'esprit du mal est marqué sur sa face.Coffee & Profit Benedict n'est pas né avec une cuillère en argent dans la bouche, comme le veut l'adage. Lui, il aurait pu avoir toute l'argenterie directement dans le gosier tant il a gagné le premier prix de la loterie de la naissance. Fils aîné choyé et adulé par ses parents, il est l’héritier, sans même savoir encore bien ouvrir les yeux, d'un empire fondé par son arrière grand-père et prospère comme jamais sous le règne de son père.
Petit c'est un enfant turbulent entourée de gouvernantes, toujours en short comme c'est la tradition dans les bonnes (et riches) familles anglaises. Il croit rapidement avoir tous les pouvoirs et les a, à son niveau. Propriétaire de son propre bateau de 30 pieds à quatre ans, quel joyeux cadeau d'anniversaire pour un gamin plus préoccupé par les dinosaures à cet âge. Son père dirige la belle multinationale de café comme deux générations avant lui et il ne risque pas de tomber à court d'argent, même s'il faisait exprès d'en jeter, littéralement, par les fenêtres de son manoir un peu trop cliché. Benedict vit dans le faste du luxe et ne connait que le oui puisqu'il n'y a rien que l'on ne puisse lui acheter. Il apprend à aimer les choses plus que les personnes, toise déjà très bien ceux qui lui sont inférieurs socialement parlant alors qu'il a à peine huit ans et qu'il fréquente les écoles privées les plus privées de la vieille Angleterre. Ses amis sont comme lui, pédants et incroyablement odieux et c'est toujours la course à celui dont le père a la plus grosse fortune. Heureusement pour Benedict, son paternel se place parmi les meilleurs de l'établissement et son avenir est tellement assuré qu'il se fiche de mal apprendre.
Quand il a dix ans, une petite Diana vient au monde, hommage à cette grade dame partie trop tôt, aimée de la patrie entière. Benedict lui la voit comme une rivale à l'affection de sa mère qui est la seule à avoir le droit à sa tendresse d'enfant trop gâté. Il manque même de la tuer un jour alors qu'il demande de la promener en landau dans le parc de la grande demeure, rongé par la jalousie. Il la cache quelque part et espère qu'elle mourra de froid ou se fera manger par les loups du bois très proche, parce que milles histoires le concerne et beaucoup contiennent de ces bêtes infâmes et pourtant inoffensives à notre époque. La petite est retrouvée pendant la nuit, Benedict puni pour la première fois et ce sentiment de frustration n'est pas pour lui plaire. On l'envoie en pension tout un trimestre pour qu'il réfléchisse mais il se contente juste de laisser sa sœur tranquille sans jamais se sentir coupable. Il croit avoir trouvé pourtant parce qu'il sait qu'il va faire fureur, il sait que ça, son paternel ne s'en remettra pas. Le problème est qu'il croit savoir trop de choses et pense qu'il est intouchable malgré les provocations incessantes.
Homosexuality & displeasure Les années passent et ne sont pas très sages. Il se fait renvoyer une fois puis une seconde sans jamais réellement attirer l'attention de son père. Benedict ne sait même pas si c'est ce qu'il veut, c'est un adolescent de dix-sept ans qui veut s'amuser, qui sent les années défiler et qui n'a pas envie de rentrer dans ce joli moule qui l'attend depuis qu'il a poussé ses premiers cris. Il se veut dur et intenable mais ça n'effraie en rien son père qui était de la même trempe. Le gamin se croit toujours plus fort que la terre entière, capable d'inventer là où il ne fait que singer tous les autres gosses insupportables et trop riches qui ont déjà vécu sur la planète bleue. Son père aime savoir qu'il n'est pas un enfant trop précieux, qu'il a cette rage au ventre qui s'assagira avec le temps mais sera très utile pour sa future place au sein de l'empire.
Il se sait attiré par les mecs depuis un peu plus d'un an maintenant alors qu'il a bientôt dix-neuf ans. A déjà couché avec certains au lycée hors de prix qu'il fréquente et où il est interne, même avec ce petit commis de cuisine chez lui, à qui il a un peu forcé la main avec sa stature au sein du manoir. Il a dans l'idée de détruire l'une des choses que son père apprécie le plus : son image. Pour ça, il se trouve quelqu'un, un gars employé chez lui encore, plutôt bien foutu, et le convainc de lui obéir pour une soirée, contre une belle somme quand on vit avec le commun des mortels. Un gala comme il y en a souvent au manoir et si la petite Diana est vite envoyée couchée au vu de son jeune âge, Benedict lui est prié de se faire voir, de montrer l'héritage de l'empire Harrington pour gonfler l'égo déjà démesuré de son paternel. Il se comporte bien les premières heures, rit faussement aux remarques plates des invités, fait du charmes à quelques jeunes demoiselles de bonnes familles, invitées avec leurs parents pour voir si elles pourraient faire de bon partis. Quand le dessert arrive et que tout le monde entend tinter le verre de cristal, les têtes et les regards se tournent vers le jeune Harrington qui se lève, une main dans la poche de pantalon de son beau et couteux smoking élégant. Il lève son verre, remercie un peu tout le monde et n'importe quoi sous le regard fier et même légèrement admiratif de son père qui pense avoir tout gagné avec son héritier. Mais alors qu'il feint de se rassoir, Benedict se relève et indique aux invités qu'il a encore une annonce à faire et plus spécialement pour son cher et aimant père. Il appelle le jeune serveur qui s'avance d'un pas peu rassuré mais tenu par l'argent qu'il attend à la fin de soirée. Benedict, pas patient de le voir si hésitant le tire par son nœud papillon quand il arrive à portée et l'embrasse à pleine bouche dans un baiser plus voyeur que tendre, lui pressant sa main au paquet pour que tout le monde puisse constater qu'il ne plaisante pas, qu'il ne fait pas semblant juste pour humilier le nom qu'il porte et devrait respecter.
« Alors Papa ? Tu vas faire quoi d'un fils unique complètement pédé ? » Plus personne ne parle et c'est le patriarche qui se lève et décide de trainer son fils hors de la grande salle de réception. Le reste n'est pas glorieux, mais Benedict pense avoir joué les bonnes cartes alors qu'il se prend toutes les insultes du monde.
Australia & Regrets Il est d'abord simplement mis à l'écart. Retiré des cours, presque isolé et enfermé toute la journée pendant de longues semaines qui se transforment en terribles mois. Le personnel autorisé à le servir est exclusivement féminin et Benedict est privé de tout moyen de communication avec l'extérieur. Il a des séances avec le pasteur -seul homme à la foi cruelle autorisé à le voir-, d'autres avec plusieurs comportementalistes et psychologues toutes choisies pour leur haine de cette décadence du plaisir de la chair entre des personnes du même sexe. Rien n'y fait, Benedict est un jour envoyé dans un centre spécial pour le rééduquer duquel il parvient à s'enfuir au bout de quelques semaines avant d'être vite retrouvé à cause de l'utilisation d'une carte bancaire volée à sa mère avant son entrée dans le centre. Il ne sera pas gay, répète son père dès qu'il en discute avec sa femme. C'est une phase et son fils ne sera pas une abjecte erreur. Il fait ça pour l'emmerder d'ailleurs.
Mais le temps passe et il faut songer à ses études. Il a vingt ans quand la décision tombe. Il a le choix, l'âge pour le faire selon son père et son grand-père qui sont du même bois. Il doit choisir entre revenir à la raison et redevenir ce fils qu'ils veulent, où bien s'orienter vers une vie plus simple, plus pauvre aussi à des milliers de kilomètres, pour éviter tout scandale. La réponse tombe rapidement, caractérisée par un beau majeur levé à la face de ses deux aînés. Ils pensent que le temps et le manque de moyens lui feront reprendre raison, Benedict est envoyé en Australie pour suivre ses études, payées au minimum, sans aucun autre geste financier de confort. Il n'est plus l'héritier de l'empire tant qu'il n'entend pas raison, il n'est plus rien là-bas, inconnu de tous, noyé dans la masse. Son père aimerait encore plus le voir sans abri que de céder à ces caprices de petit con.
Avec sa trop grande fierté, Benedict décide d'accepter le deal, de faire ses études, de revenir triomphant et tout aussi pédé, comme il le clame avant de dire au revoir. Il pense que c'est simple, la vie sans argent, sans toutes les facilités, sans personne pour vous servir. Il pense avoir raison là où il n'y connait rien.